Nous voulons des coquelicots 89

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Agriculture Bio


l’agriculture bio illustrée par l’exemple

Le documentaire suit pendant douze mois un « grand céréalier » des Charentes, de sa dernière moisson « chimique » à la première sans pesticides. 3899b97_hPPSJr2KBQvZ36fwYgNsK0qH

 

Les premières images de moisson marquent une fin, celle de l’agriculture « chimique », sur les terres de Paul François, un « grand céréalier » – à l’échelle de l’Hexagone –, qui exploite 240 hectares en Charente. Herbicides, fongicides, pesticides… « La chimie nous a apporté du confort », reconnaît en introduction l’agriculteur, qui, sans renier son passé, a néanmoins décidé de passer au bio. Un immense défi à cette échelle, que le documentaire d’Eric Guéret nous permet de suivre durant un an, jusqu’à la première moisson biologique. Douze mois d’adaptations, de tâtonnements, de drames aussi, particulièrement instructifs alors que se tient en ce moment à Paris le 57e Salon de l’agriculture, jusqu’au dimanche 1er mars. 

Paul François est, plus qu’un autre, sensible à l’enjeu environnemental. Son nom d’ailleurs ne vous est peut-être pas inconnu. En 2004, il s’est intoxiqué gravement en manipulant du Lasso, un produit phytosanitaire produit par Monsanto. Après cinq mois de « périple hospitalier », il reste aujourd’hui, à 55 ans, handicapé par des séquelles au cerveau, un système immunitaire défaillant, des céphalées chroniques… qui l’empêchent périodiquement de travailler. Et l’ont conduit à attaquer en justice le géant agrochimique en 2007. Cette démarche l’a entraîné dans un marathon judiciaire d’une violence qu’il n’imaginait pas et qui va connaître son dénouement devant les caméras de France 3 treize ans plus tard, en avril 2019.

Lire dans le Monde le compte-rendu : Monsanto condamné pour l’intoxication d’un agriculteur français

Il en résulte un documentaire à deux niveaux, traçant des sillons parallèles. D’un côté, les premiers douze hectares de haricots verts semés « sans rien », un 24 juillet, sur une musique guillerette censée symboliser la renaissance ; l’arrachage des mauvaises herbes par sept ou huit jeunes hommes – un poste « humain » pas plus cher que le poste « herbicides-fongicides » ; les premiers échecs ; les visites de contrôle faites avec le sourire mais draconiennes ; les conseils d’un précurseur canadien qui applique la philosophie du tai-chi (dévier la force de l’adversaire plutôt que l’affronter) aux mauvaises herbes.

Combat juridique

De l’autre, le combat juridique mené au côté de l’avocat François Lafforgue. Moins attrayant dans le rythme mais essentiel sur le fond, que ce soit lorsqu’il cite une étude menée sur la santé de 180 000 agriculteurs depuis quinze ans, ou le rachat de Monsanto par Bayer, vécu par les salariés du groupe pharmaceutique comme une trahison, et accueilli aux cris de « kein Glyphosate ».

Si l’on peut regretter une légère tendance à la sensiblerie et certaines facilités de dialogue – « On est tellement dans un monde gouverné par l’argent » –, le passage sur l’irresponsabilité des politiques dans le dernier quart du film tombe à pic, n’épargnant ni Agnès Buzyn, ancienne ministre de la santé, ni le président Emmanuel Macron.

Visionner sur facebook:

https://www.facebook.com/BonnePiocheProd/videos/651923372225007/

« Honte à eux ! », lance Paul François avant de rencontrer le couple Hulot.

Une séquence où chaque mot a son importance et dans laquelle l’ancien ministre de l’environnement revient sur les causes et les conditions de son départ du gouvernement, sur sa volonté contrariée de « copiloter » la réforme agricole, sur la puissance des lobbys – « J’ai trouvé plus de conservatisme au ministère de l’agriculture qu’à la FNSEA [plus gros syndicat paysan]. » « Tous les coups sont permis. » Après avoir encaissé, les deux combattants ont visiblement besoin de parler. A nous de les écouter.


29/02/2020
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